Ca fait bien quelques mois que je réfléchis à ce point et e n'est toujours pas complètement mûr dans ma tête. Toutefois après avoir écouté le podcast sur Trip to Skye et avoir repris ma campagne de Sens Mort en janvier j'arrive à un constat de rupture avec l'une des propositions majeur du jeu, je n'aime pas maitriser des personnages "classes".
Je m'explique, Ridger (pour ceux qui ont suivi nos aventures en podcast) est l'archétype de la classe. C'est un personnage que j'aime énormément pour ce qu'il me permet, pour ses coups éclats, pour sa propension démesurée à vouloir capter la lumière et briller quitte à se bruler. Et Sens m'offre ça en tant que joueur. Ca m'amuse, beaucoup, énormément, passionnément. Ridger c'est ma charentaise du perso de JDR. Je la connais par coeur, on forme un vieux couple depuis notre adolescence et on s'est jamais vraiment lâché. Ridger c'est ma gamme à moi, mon univers de jeu, mes codes, mais aussi et surtout (maintenant) mes travers.
Pourquoi mes travers ? Parce que j'ai bientôt passé le cap de la moitié de mon espérance de vie et que de jouer un mec de 20 piges ascendant mannequin triclassé goth-emo-poète, c'est caricatural d'autant que j'utilise des codes propres aux années 90 depuis longtemps disparus. En soit, il n'y a rien de grave à jouer une caricature (encore fait il en avoir conscience mais là n'est pas le point de mon propos). Je suis donc d'autant plus caricatural que je ne suis plus "dans le coup". Pour autant comme je le disais plus tôt ça m'amuse et il s'avère que ma table de sens (en tant que joueur) est à la fois charitable et surtout de la même génération que moi (excepté Romaric mais l'écart d'âge se comble ici facilement pour pleins de raisons personnelles que je ne vais pas développé ici mais qui sont liées à nos parcours et sensibilités).
Revenons donc au "problème" que j'ai avec la classe en passant derrière le paravent, en tant que MJ.
Aujourd'hui je remarque que mon niveau d'immersion à un jeu est de plus en plus lié au réel. En réalité je pense que ça a toujours été sauf que mon réel (aka ma perception du monde) à 14, 20 ou 45 ans n'est pas le même.
Pour commencer par la forme,
Aujourd'hui je remarque j'ai besoin de plus en plus de normalité dans les jeux. Pour ma campagne de Sens j'ai exigé qu'aucun PNJ amené par les joueurs ne soit d'une beauté irréelle. J'ai peuplé Sens de "vrais" gens, toutes mes illustrations sont tirées de photos de gens normaux qu'on pourrait croiser dans la rue avec une vraie diversité et parfois des singularités. Seuls les immortels ont droit d'avoir des physiques hors du commun (photos retouchées "parfaites" tirées de instagram).
Je n'en peux plus des esthétique de jeux où tous les personnages sont des mannequins tirés d'un blockbuster hollywoodien ou d'un shonen. C'est la première étape pour ancrer ma partie dans l'immersion (et ça marche pour moi).
Pour enchainer sur le fond,
Ensuite, maitriser des situation héroïques ne m'amuse plus. Plus j'avance et plus je remarque que ce qui me plait dans Sens c'est les dilemmes moraux des personnages et pour ça on n'a pas besoin de superpouvoirs. Voire, les super-pouvoirs sont contre productifs. Je suis aujourd'hui plus touché par un personnage confronté à sa vulnérabilité qu'un personnage confronté à une épreuve de force ou de débauche de pouvoir ou même de création en situation. Pour moi le merveilleux d'une partie de JDR n'est jamais aussi puissante que lorsqu'on touche au réel, qu'on ancre les problématiques des personnages dans le quotidien des joueurs à partir d'éléments qu'ils rencontrent (ou peuvent rencontrer) dans leur vie.
Ainsi je trouve "la classe" contre-immersive et un frein au type de campagne que je veux maitriser.
J'essaie d'épurer Sens de ses combats au maximum car je trouve que c'est particulièrement là que ce joue la classe.
D'ailleurs j'ai bien dit à mes joueurs que l'issue des combats était déterminée (certains profils gamistes on failli s'étouffer) afin d'étouffer le feu de la tentation de l'optimisation. J'ai des envies de personnages normaux, qui jouent "pour de faux" des situations normales le tout dans un cadre merveilleux.
Pour conclure,
Notez que je n'ai pas de problème avec le merveilleux, avec le fait de transformer le réel pour jouer du futuriste, du dystopique, du passé historique... mais j'ai envie que mes personnages soient des humains avec des réactions humaines, avec des faiblesses et des blessures humaines et avec des apparences humaines.
Il s'agit simplement d'une réflexion que je vous partage qui n'est ni une vérité, ni une critique mais l'expression d'une envie ancrée dans le présent. Un moyen d'ouvrir d'autres portes pour certains MJ qui, comme moi, sont un peu lassés de la classe et des personnages-poseurs.