Et voilà. Gladius est mort. Plus de crème glacée. Et le moins qu’on puisse dire c’est que ça m’a un peu arraché les tripes de décrire cette scène. J’étais aussi dégouté que mes joueurs, et j’avais envie de les secouer par le col en leur hurlant dessus : « Mais bougez vous ! Empêchez moi de le faire ! ». Mais non bien sur. Ils n’ont pas encore compris que leur plus grand pouvoir sur l’histoire, c’est leur pouvoir sur moi. Mais commençons plutôt par le début.
Aquacity (partie 2)Nous avons repris l’Epreuve à l’arrivée du subzéri de Mordyns : le « Nemesis » (
subtilité quand tu nous tiens… Oh tu peux parler toi), à Aquacity. Les Bugs se méfient d’elle depuis longtemps, et ils décident de s’organiser pour l’espionner 24h/24 durant son séjour, en la filant de loin, en restant camouflé dans son appartement, ou en utilisant « Fêlé » — le Fragile que Sélor a rencontré durant son épreuve en solo. Depuis qu’ils sont à Aquacity, le Bug promène le Fragile partout avec lui dans un thermos pour l’aider à mieux comprendre les humains et pour « travailler leur connexion » en vue de futures missions militaires.
Les Bugs assistent donc à un passage de savon à Mordyns de la part du Conseil à propos de la mission à Paris (voir les épisodes précédents) et aux excuses privées de la Générale au Professeur Lyndberg et à sa fille. Le comportement de la Générale est suspect : elle a l’air nerveuse, presque parano, et elle essaye de se couvrir auprès de Lyndberg en faisant croire que c’est le Conseil qui a planifié la mission et qu’elle n’était qu’une exécutante. Je vous passe les détails, mais les Bugs soupçonnent rapidement que leur vieille ennemie mijote un mauvais coup en rapport avec le Conseil, et ils se demandent si elle ne prévoit pas carrément un gros attentat pour le jour J.
Un petit moment drôle à noter tout de même : Sélor et Achénar hologrammés en robot d’entretien comme — je cite — « l’avant et l’arrière d’un costume de cheval », pour récupérer un indice. Pendant ce temps, je mime Classiss qui tire une chaise pliante au milieu du trottoir et s’installe pour regarder le spectacle en buvant un gin-tonic avec une longue paille.
Les Bugs perdent du temps à suivre une fausse piste montée de toutes pièces par Mordyns, puis Soren mentionne en passant qu’elle est inquiète parce que le Narmada n’a pas répondu au dernier rendez-vous radio prévu. Les Bugs commencent à se faire du soucis et se demandent quoi faire. Gladius, Maria et Michel sont sur ce subzeri (et Wilfried aussi, mais ils ne le savent pas encore). S’il a un problème, c’est la moitié du Conseil qui saute avec lui !
Peu après, Ared Singh — un espion avec qui ils sont liés depuis « La cité des Rêves » — les contacte avec des infos tonitruantes : d’une part, plusieurs des hommes de Mordyns sont introuvables au Pôle Sud, on a complètement perdu leur trace. D’autre part, il a fini de reconstituer le journal de Vigo Néméo et ils contiennent la preuve que c’est Mordyns qui a suggéré au Professeur d’envoyer des cyborgs à Yuminato, et que c’est également elle qui a ordonné à Néméo le bombardement à coup d’armes chimiques de la ville pour effacer les preuves. Mordyns les a balladé durant des mois. Tout ce qu’elle a fait durant les dernières épreuves était fait pour couvrir ses traces et semer le doute dans leurs esprits.
Bien remontés, les Bugs décident d’intervenir sans attendre les forces de l’ordre. Achénar, qui était camouflé dans l’appartement de Mordyns depuis des heures, utilise ses hologrammes pour retenir la Générale et sa garde du corps — une cyborg surentrainée qui se fait passer pour une secrétaire empotée. Sélor et Mya les rejoignent et engagent le combat pour les empêcher de fuir. Sélor plaque Mordyns au sol sans ménagements, pendant que Mya retient la cyborg avec son grappin. Achénar tire une balle dans la jambe de la Générale sans sourciller — elle l’avait traité de « saltimbanque » un peu plus tôt. Mordyns joue alors son dernier atout : elle se contorsionne et sort une fiole de sa poche en menaçant de répandre son contenu si les Bugs ne la laissent pas partir. Les Bugs hésitent. Ils ont découvert un peu plus tôt qu’une alliée de Mordyns, élève de Néméo, travaillait à recréer le virus du Professeur. Si Mordyns lâche la fiole, toute la ville pourrait être contaminée. Sans hésiter une seconde, Mya coupe la main de Mordyns et l’emporte — avec la fiole — dans l’Ombre-Monde. C’était un pur coup de Bluff de la part de Mordyns, mais les Bugs ne le savent pas encore. La générale, bien calmée, est envoyée à l’hôpital. Son assistante en prison sous bonne garde. Les Bugs se précipitent à la suite de Soren pour porter secours au Narmada.
Soren et les Bugs embarquent dans de petits vaisseaux de transport avec quelques troupes et le fraichement promu Général Conrad (celui du Pôle Nord). Après un vol rapide, les Résistants arrivent au dessus de la position supposée du subzeri. Sans surprise, ils apprennent que le Narmada et son escorte ont des problèmes de communication et qu’ils soupçonnent avoir été infiltrés par une équipe de saboteurs. Dans le même temps, les senseurs de la navette s’affolent : une plate forme de transport de l’Omicron, lourdement armée et escortée, s’approche rapidement de leur position.
Priorité au Narmada, les Bugs et Soren plongent pour aider les occupants a débusquer les hommes de Mordyns. Après quelques péripéties rapides, ils arrivent à capturer ou à tuer les saboteurs et à déjouer leur plan. En utilisant le code de sécurité du Professeur Lyndberg, Mordyns a transmis le plan de route du Narmada à l’Omicron. Pendant ce temps, ses hommes infiltrés à bord du subzeri devaient brouiller les communications et installer des charges explosives. Juste avant la bataille, il devaient s’enfuir à bord d’un module d’exploration et faire sauter le Narmada. Officiellement, le subzeri aurait été détruit pendant l’assaut, Mordyns aurait été débarrassée de la moitié du Conseil, et mis l’autre moitié en position précaire. De plus, ce crime aurait causé une colère telle chez les Résistants que la Générale aurait eu beaucoup plus de latitude pour faire valoir ses méthodes expéditives.
Après ces révélations, les Résistants n’ont pas le temps de souffler. Il faut s’occuper de cette unité de l’Omicron qui leur fonce dessus. Les Bugs se lancent dans la bataille et partent désactiver les systèmes clefs de la plate forme volante : le contrôle des drones et les lance-torpilles. Ils en profitent pour prendre d’assaut la passerelle de commandement et capturent l’énorme machine. Mais lorsque les Bugs s’apprêtent à crier victoire, des éclairs bleus frappent les flots alentours. Les Quadrillas surgissent depuis l’Ombre-Monde. Ils volent autour du Narmada et projettent des éclairs sur la coque. d’autres flottent comme des ballons grotesques au dessus de la plate forme et repoussent les vaisseaux Résistants. Les Bugs reçoivent un appel à l’aide de Soren : les Quadrillas ont pénétré le subzeri !
Les Bugs décident de faire se crasher la plateforme sur l’océan et courent rejoindre le subzeri. Ils sont arrêtés par « Harmonie » un•e élégant•e Quadrilla qui utilise ses ombres-pouvoirs pour les ralentir. Étrangement, iel a l’air de jouer avec eux. Avec un peu d’efforts et de coordination, les Bugs abattent Harmonie, et avant de mourir ils peuvent apercevoir un dernier sourire énigmatique sur son visage.
Les Bugs entrent dans le subzeri où règne le chaos le plus total. Les Résistants se battent de leur mieux contre les Quadrillas mais leurs balles s’écrasent contre les carapaces de ces créatures. Soren protège les membres du Conseil avec les ailes de sa Resplioïde blanche. Dans la mêlée, les Bugs aperçoivent Météore — vêtu d’un uniforme d’officier tout en foudre — et une Quadrilla qu’ils ne connaissent pas — dans une tenue qui évoque Captain America — qui défend ses compagnons à coups de boucliers d’ombre-énergie.
Une autre Quadrilla se place devant les Bugs et les défie. Elle est petite, l’air féroce, et sa carapace ressemble à une combinaison renforcée (dans ma tête, elle ressemble un peu à un « Ruby » de Steven Univers pour les connaisseurs). Elle veux venger la mort de son ami•e, et Sélor et Achénar décident de l’affronter à deux. Ils veulent tester une théorie : d’après eux, les Quadrillas ne devraient pas pouvoir utiliser leurs pouvoirs dans l’Ombre-Monde, comme eux en sont incapables dans la réalité. Erreur, comme ils s’en rendent vite compte. Achénar emprisonne la Quadrilla dans une sphère d’ombre-glace, mais « Castagne » s’en extrait facilement par un aller-retour rapide par la réalité et elle se sert de la sphère de glace comme d’un gant lesté pour frapper les Bugs. En combiné avec Sélor qui affronte la Quadrilla physiquement, Achénar essaye de la blesser psychologiquement. Il prend l’aspect d’Harmonie, blessé•e et implorant•e. Il l’accuse de n’avoir pas su le/la protéger. La Quadrilla est blessée au cœur, et elle utilise la Furie pour donner une leçon aux Bugs. Mais la Furie brule la défense de Castagne, et les Bugs prennent le dessus. Finalement, alors qu’ils sont sur le point de lui donner le coup de grâce, Sauveuse — c’était elle en Captain America — arrive pour la tirer d’affaire. « Vous êtes des monstres…» crache-t-elle au visage des Bugs.
Dans la réalité, le combat fait toujours rage, et Mya se défend de son mieux grâce au bouclier de sa Resplioïde des assauts de Météore qui, lui aussi, semble jouer avec elle comme un chat avec une souris (expression utilisée par Sélor plus tard). Ses frères Bugs la rejoignent, et ils s’apprêtent à se lancer contre le prochain ennemi quand apparait Kranisten.
Grand, impressionnant, sa carapace bleue le fait ressembler à une statue de marbre ou de turquoise. Son visage est couvert par un masque qui figure une tête de mort stylisée (comme certains masques précolombiens). Il s’avance calmement au milieu du combat, comme si rien ici ne pouvait l’atteindre.
Il croise le fer avec les Bugs, qui se rendent vite compte qu’ils ne font pas le poids. Ils essayent différentes tactiques — et claquent quelques faits de Cellulis — et le Quadrilla leur assène plusieurs coups maitrisés pour leur rappeler qu’il les domine totalement. Il félicite même les Bugs de leurs progrès, avec ironie pensent-ils. Finalement, il balaye les trois Bugs d’un éclair qui les projette contre la paroi du subzeri. Une ombre aux cheveux blancs les réceptionne et essaye de les entrainer loin des combats. C’est Wilfried. « Il faut qu’on sorte d’ici », crie l’Immortel. Mais Kranisten a d’autres projets. Il saute gracieusement sur le Poète, et s’apprête à lui porter un coup mortel. Gladius, voyant cela, se précipite pour s’interposer entre le Quadrilla et sa victime. Il est frappé de plein fouet, presque coupé en deux par le coup.
Alors le silence semble se faire autour des Bugs. Le Général tombe à genoux. « Attention à toi, mon frère », murmure-t-il. Du sang coule de sa bouche. Il sourit aux Bugs, à Mya particulièrement, puis il tombe face contre terre. Les Bugs et les joueurs sont médusés et dégoutés. Mya vide son chargeur sur Kranisten. Elle veux se précipiter vers lui, mais Sélor la retient de toute sa force. Achénar ne bouge pas, stupéfait.
Un cri de douleur brise le silence : « Non… ». C’est Soren. En larmes, elle se place entre Kranisten et le corps de Gladius. Sa Resplioïde est défaite. Elle défie le Quadrilla du regard et fait rempart de son corps (
Athénaaaaa). Tous les combats se sont arrêtés. Les Quadrillas observent leur leader. Kranisten est complètement figé, les yeux fixés dans ceux de l’Immortelle. Impossible de dire à quoi il pense derrière son masque de foudre. Météore pose la main sur l’épaule de son compagnon et prononce son nom. Enfin, l’Éveillé sort de son mutisme et s’adresse aux Bugs : « Nous vous attendrons à Paris et Berlin. Lorsque vous serez prêts, venez. ». Puis les Quadrillas glissent sans bruit dans l’Ombre-Monde.
Je laisse passer une très longue minute où je décrit la scène aux Bugs : Gladius allongé sur le sol, Soren et Maria, les mains couvertes de sang, qui se précipitent pour essayer de le soigner. Mya est à genoux, toujours dans les bras de Sélor, et je lui décrit comment dans la foule qui devient de plus en plus floue, elle voit un étrange personnage vêtu d’un costume de théâtre et d’un masque de démon. Il regarde une montre. « Tic, tac… » dis-je au joueurs, « Tic, tac… ». Lentement, je répète : « tic… tac… tic… tac… ». Avec mon bras levé je mime un lent mouvement de balancier. Je les regarde avec insistance. Je guète leurs réactions.
C’est le moment de l’Aiguillage, je pense en moi-même. Droite… ou gauche .. ? Tic… ou tac.. ? Je porte un masque moi aussi. J’ai envie, et pas envie, de leur dire tellement de choses.
Arrêtez moi, si vous l’osez. Mais l’Instant file. Je le sens. L’heure n’est plus à l’action, mais à la tristesse, aux regrets et à l’amertume. Les Cellulis ont déjà Accepté le Fait. Les Bugs parlent vengeance, meurtre, exécution sommaire. J’inspire à fond. J’avale ma salive au gout… Acide ?, et je reprend la narration pour décrire un petit épilogue. Le voici tel que je leur ai lu :
En prison, la Générale Mordyns est assise sur le lit de sa cellule, le visage dur et fermé. Elle contemple les mille petites cicatrices qui parsèment ses bras et ses mains (« sa main », me reprend
Achénar). Elle sourit. Il y en a de bien plus terribles, cachées sous cette tunique de coton. Toutes témoins d’une vie bien remplie. Des pas légers s’approchent dans le couloir. Encore des questions pour elle ou simplement la ronde d’un garde au pieds plus lestes que ceux de ses collègues ? La porte de la cellule s’ouvre. La Générale lève les yeux, et la surprise se lit sur son visage. Dans l’encadrement de la porte, une grande silhouette sombre se découpe. L’ombre prononce quelques mots, d’une voix grave et douce : « Je t’accepte.».
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Bon déjà. C’était. Long. On a commencé à jouer vers 12h et on a finit vers 22h avec des pauses pour manger et j’ai quand même eu le sentiment d’avoir bâclé quelques trucs. Ce qui me fait dire qu’il faut que je mette moins de choses dans mes Épreuves à l’avenir.
Ce qui m’aura marqué aussi c’est la cruauté des Cellulis et/ou de leurs Bugs au cours du scénar. En plus du traitement de Mordyns lors de son arrestation, il y a aussi eu pas mal de violence graphique (décrite par les Cellulis) pendant la traque des saboteurs et de l’assaut de la plate forme. Après la mort de Gladius, Mya et Achénar étaient partant pour tuer Mordyns de leurs propres mains, et il est possible qu’ils exécutent sans procès ce qui reste de ses hommes durant le voyage de retour. Nous n’en avons pas encore parlé, j’attends que la tension retombe un peu.
Je suis un peu triste, et pas totalement satisfait de clore « l’arc » Mordyns de façon un peu précipitée. Mais la fin de Renaissance approchant, je préfère libérer un peu la scène pour les deux dernières Épreuves.
J’ai lancé une perche supplémentaire vers la future transformation d’Achénar qui sera au cœur du prochain scénar, aux cotés du retour de Finlongfinger. En sortant de l’Ombre-Monde, Achénar ressent à nouveau cette étrange sensation de quelque chose qui lui touche le visage. Les Bugs remarquent quelque chose : cinq petites marques sur la Resplioïde d’Achénar. Cinq marques placées sur le coté de son visage et sous son œil. Sélor se souvient alors de leur rencontre avec Graveur. Durant leur combat, après qu’Achénar ai prit l’apparence de Métatron, le Quadrilla avait touché le visage du Bug, dans un geste de tendresse.